NOTES de lecture octobre 2021
Publications reçues par la SEJ et disponibles à la médiathèque de Lons, par Jean Michel Bonjean
Le Jura
NOTES de lecture
Publications reçues par la SEJ par Jean Michel Bonjean
La parution dans une publication de l’École Française de Rome (L’EXPÉRIENCE DU DÉCLASSEMENT SOCIAL. FRANCE-ITALIE, XVIe-PREMIER XIXe SIÈCLE), d’un texte de Claude Isabelle Brelot, Nobles français dans la spirale du déclassement (1780-1860), permet à l’auteur de mettre en lumière, à travers l’exemple de nobles comtois qu’elle connaît bien, la différence entre déclin familial et déclassement. Une analyse fine permet d’approfondir les différentes manières d’y parvenir : situations financières, nécessité d’exercer une fonction, déficits éducatifs, dissipation des mœurs ou alliances roturières. La présentation de la grande variété du devenir de cette petite partie de la noblesse comtoise au XIXe s permet de découvrir aussi les moyens, souvent genrés, utilisés pour tenter parfois de corriger ce déclassement.
La parution du nouvel opus de MêtaJura, Le Grandvaux jeté vers le ciel, offre au public un très dense condensé des connaissances actuelles sur cette partie si attachante du Jura. Les nombreux auteurs, dont beaucoup participent aussi activement à nos travaux, ont été choisis pour la qualité et la précision de leurs contributions. Belle invitation à poursuivre les découvertes au sein d’un patrimoine géographique, historique, littéraire et artistique fort et séduisant dont la lecture est destinée autant au touriste qui découvre le Grandvaux qu’au lecteur jurassien.
Dans le cadre des publications mémorielles de la guerre de 14-18, Guy Reydellet, avec Le Monument, cinq villages de la vallée du Suran pendant la Grande Guerre, présente une documentation très précise centrée sur les villageois du sud du Jura. Présentées pratiquement au jour le jour et personnage par personnage, ces deux cents pages font revivre au ras de leur existence et avec beaucoup de sensibilité, chaque famille de ces villages pendant cette époque dramatique.
Dans Haute-Saône SALSA n° 113, janvier-avril 2021, des précisions locales concernent la mainmorte,nt les attitudes des édiles face à l’épidémie de 1630, l’influence du chemin de fer sur l’exode rural, la position du clergé en regard du contrôle des registres paroissiaux ou un problème architectural patrimonial (la tour de Champagne à Passavant-la-Rochère). Elles accompagnent la poursuite de la publication concernant l’Action française en Haute-Saône tandis que deux articles explorent la personnalité de deux peintres locaux : Jacques Prévost et sa famille au XVIIe siècle et Timothée Hacquart au XIXe s.
Les Bulletin et Mémoires n°143, 2021 de la Société d’émulation de Montbéliard, présentent des articles concernant tous la région de Montbéliard et l’épaisseur de son histoire. Histoire protestante avec celle de la théologie appliquée au temple Saint-Martin, histoire économique avec l’étude fort poussée d’une famille d’industriels issue de la pratique des moulins jusqu’à l’horlogerie, la fabrication des vélos et des automobiles (les Jeanperrin) et histoire scientifique autour de Georges Cuvier. La Guerre de 1870-71 fait aussi l’objet de deux présentations, exploitant l’une des documents militaires spécifiques au pays de Montbéliard, l’autre le journal tenu par une habitante pendant une partie de cette guerre. Une page de cette publication nous concerne cependant, celle, modeste, évoquant Alfred Eugène Jeanperrin qui fut inspecteur d’académie à Lons-le-Saunier de 1900 à 1916, et alors patient du docteur Thévenet (p.77-78).
La densité des articles contenus dans le Bulletin de la Société Dunoise d’Archéologie, Histoire, Sciences et Arts, n° 311, 2021 n’a d’égale que la qualité des renseignements qu’ils apportent. L’archéologie aborde aussi bien l’Antiquité que le Moyen-Âge (atelier de débitage du silex, voies antiques, bâtiments civils, religieux ou militaire). L’étude soigneuse du fonds d’un libraire en 1791, les vocations religieuses de prêtres sous la Révolution précèdent la suite de l’étude remarquablement fouillée concernant la vie sociale du Dunois au milieu du XIXe s commencée dans les publications antérieures (cette fois-ci, étude sociologique et économique des vallées : ressources en eau, moulins, maraîchages et conséquences socio-économiques sur l’habitat, depuis les châtelains retirés sur leurs terres après 1830 jusqu’à leur personnel et au fonctionnement communal). Un article met en valeur, par l’étude originale des différents types de lucarnes de la ville, les évolutions de l’urbanisation de Châteaudun ; un autre s’intéresse aux éléments résiduels des reconstructions après les destructions de 1870 (numismatique, insigne des 41 milliards de 1872 ou plaques mémorielles du « sou des chaumières »). L’époque contemporaine n’est pas oubliée avec une étude sur le jumelage, qui disparaît après les accords d’Evian entre Châteaudun et Châteaudun-du-Rhumel.
Le Bulletin 481, t. 29, mars 2021 de la Société académique des Antiquaires de la Morinie comporte des articles traitant d’archéologie (les découvertes d’ossements de mammouth au XIXe siècle dans la vallée de l’Aa, un quartier médiéval à Saint-Omer, les réflexions découlant de la découverte d’une lustreuse à boutons britannique), de bibliophilie (les éditions rouennaises de la bibliothèque de Saint-Omer) et de politiques sociales et judiciaires diverses (une pendaison par contumace sous l’Ancien Régime à Ecques, la tentative de coup d’état de L. N. Bonaparte en 1840 et le devenir d’un des conspirateurs, une affaire de cœur et de liaison autour du fils du colonel Flatters en 1914).
Par Charles Debacker, L’épopée du 8ème de ligne (1914-1918) (Soc. Antiquaires de la Morinie) permet au lecteur de plonger dans les horreurs vécues pendant la Guerre de 14-18 par ces soldats malgré (ou en raison?) des prouesses techniques et humaines qui ont accompagné ces épisodes. Les illustrations nombreuses et rarement publiées n’occultent pas les trajectoires militaires.
Dans le Bulletin 2020 de la Société d’émulation d’Abbeville, t.33, fasc. 5, des choses d’intérêt local ou de culture générale, mais aussi trois articles d’histoire de l’art ont retenu l’attention : d’abord une biographie de Marie Court (1808-1883), modèle et compagne du peintre Joseph-Désiré Court, alors célèbre, dont le portrait figure parmi les collections du musée Magnin. Elle eut un parcours de vie typique des milieux artistiques parisiens du XIXe siècle et elle mérite d’être repérée dans ce contexte attachant.
L’aventure survenue aux beaux moulages d’Angkor de Louis Delaporte, depuis leur succès lors de la découverte des temples, de la création des grands musées asiatiques parisiens et des expositions célébrant l’Empire colonial, suivi de leur relégation frisant l’abandon dans des édifices provinciaux puis de la redécouverte moderne de leur importance, est un bel exemple de la façon dont la mode affecte les connaissances et du danger qu’il y a à mépriser certains objets. Enfin la découverte de deux graveurs abbevillois du XVIIe siècle, les Leclerc, dans une spécialité pourtant depuis longtemps étudiée et publiée par des savants illustres, permet de donner accès au lecteur à bien des plaisirs, sans oublier celui de voir apparaître les noms comtois de Fenouillot de Falbaire (p. 737) et de l’abbé d’Olivet (p. 741).
Avec l’édition bilingue d’une brochure intitulée Iconography of the Gundestrup cauldron, la Société Dunoise d’Archéologie, Histoire, Sciences et arts et B. Robreau tentent un intéressant essai d’analyse iconographique du célèbre « chaudron de Gundestrup », en exploitant aussi bien les rares sources archéologiques gauloises que la littérature légendaire celtique.
Le Bulletin de la Société archéologique de Sens t. XI, 2020 est riche d’articles patrimoniaux (la ville de Sens, sa cathédrale et son trésor, les hôtels particuliers et leur histoire), biographiques qui voient passer les noms plus ou moins célèbres (les architectes Buron et Viollet-le-Duc, le romancier Jules Case) et d’histoire de l’art (numismatique avec un solidus du roi Sigismond du VIe siècle, sculptures médiévales, broderies et portrait du XVIe s autour du cardinal du Perron). Deux études spécifiques intéressent le lecteur l’une consacrée au mode de recrutement des personnels de Eaux et Forêts au XVIIIe s, l’autre aux fusillés de l’Yonne et du Sénonais pendant la dernière guerre.
Dans une situation assez comparable à la nôtre, la Société des Sciences Historiques et Naturelles de Semur-en-Auxois et des fouilles d’Alésia, a réussi aussi à faire paraître son Bulletin CXXVIII, 2020, avec plusieurs articles de grand intérêt. Un dossier présente un ensemble de photographies anciennes de Semur-en-Auxois, ensemble privé qui vient d’être numérisé, et qui permet une approche neuve sur la ville de la deuxième moitié du XIXe s, et une petite présentation des photographes qui y ont travaillé. Un article traitant des agglomérations d’origine castrale en Auxois jusqu’au XIIIe siècle permet là encore une belle compréhension de l’histoire du haut Moyen-Âge dans cette partie du Duché de Bourgogne. C’est l’occasion de faire le point sur les méthodes d’étude et de présentation du sujet dont il serait heureux qu’il puisse concerner notre partie du Comté. D’autres articles traitent de patrimoine (le château de Bierre-lès-Semur, les « boîtes » de sainte Reine au XVIIe s) ou de biographies locales (Gradés de la Garde nationale de Semur pendant la Révolution, le baron de Conforgien et le protestantisme à la fin du XVIe s, le ministre Lecat)
Dans Lemouzi, n° 227 (2021-1), les articles, tous centrés sur la région, associent harmonieusement les biographies locales et les lieux correspondants, rendant vivant un passé parfois proche. De même, on ose y traiter aussi bien de cuisine locale que de linguistique, le tout bénéficiant d’une présentation indiscutablement documentée, voire scientifique.
De façon habituelle, la revue GéoRegards,de la Société Neuchâteloise de géographie, n° 13, 2020 présente au lecteur de multiples points de vue qui, s’ils ne concernent pas notre département, sont cependant riches en découvertes : résidences étudiantes en conteneur, comparaison dans l’enseignement de géographie dans différents cantons suisses, pratique spatiale de la « zone » en milieu urbain, mobilité des jeunes, travail frontalier, circuits alimentaires de proximité, etc.
Il y a de multiples renseignements à découvrir à la lecture de Patrimoine Polinois , n° 35, 2020, depuis la présentation des circonstances du rattachement au XIIIe siècle du sol à la France, jusqu’au recensement des noms de lieux du territoire de Poligny expliqués par leur étymologie, et l’étude statistique de la population entre les deux guerres. La biographie tout à fait neuve de la famille Ligier est suivie de la présentation de la personnalité du capitaine Magnien. A ces figures de Polinois notables, la publication joint les souvenirs personnels d’une vieille habitante du quartier des Boussières, la description peu commune de la gestion d’un établissement de bains privé et la présentation d’un instituteur et de son école entre 1899 et 1932.
Dans Bulletin de la maison du patrimoine d’Orchamps, 2021, n° 40, on trouvera la présentation des tapisseries de Salins, l’histoire de l’école à Our, une description de restes de fortification à Ougney et à Rochefort et deux pages sur les peintures murales de l’église de Rainans dues au talent de Pierre Pfister (1895-1963) présentées par S de Vesvrotte.
Dans la nouvelle parution du Bulletin annuel n° 44, 2021 des Amis du Vieux Saint-Claude,un dossier autour du vêtement et du textile contient une publication précise et neuve sur la filature de coton de Saint-Claude, la biographie d’un Reffay, maître-ouvrier en soierie à Lyon, des précisions bienvenues sur les fusaïoles modernes et la présentation des sources iconographiques utilisées par Pidoux de la Maduère pour d’anciennes publications à ce sujet. Une petite compilation sur les pèlerinages à Saint-Claude au XVIe siècle est suivie d’une présentation fouillée de l’histoire de la commune de Cinquétral sous la Révolution.
Le Jura Français, n° 328, nov-fév 2021, en même temps qu’est annoncée « pour des raisons de coût financier », la très triste suppression prochaine des supports-papier, publie, parmi les articles habituels, l’évocation de belles pages de la vie culturelle comtoise d’où se détachent la présentation des sites à pistes de dinosaures locaux, un original travail sur la relation du pape Innocent XI avec les Comtois de Rome à la fin du XVIIe siècle et surtout une belle présentation du milieu des libraires à Besançon au début du siècle suivant sous la plume de Michel Vernus.
Autour des archéologues lédoniens (S. David, D. Billoin, N. Bonvalot, J. L. Mordefroid, F. Passard-Urlacher), le Centre jurassien du patrimoine, édite Dans le Jura roman, Premières églises(don). D’une grande richesse d’informations, ce petit volume établit un point indispensable sur les connaissances actuelles de cette rare merveille de notre département que sont les édifices religieux du haut Moyen Âge. En trois parties, les auteurs présentent successivement les traces certaines de l’implantation chrétienne avant l’an mil, puis insistent à juste titre sur les églises du XIe siècle, éléments majeurs et trop peu connus de la richesse départementale, pour aborder enfin les réalisations romanes du XIIe siècle. Ajoutons que les illustrations contenues dans ces 140 pages magnifient encore aussi bien leurs propos que les architectures. Une publication indispensable à ceux qui les redécouvriront.
Dans Haute-Saône SALSA n°112, sept-déc. 2020, une mise au point sur le titulaire d’un blason problématique, l’attention justement attirée sur un modeste mais peu connu élément du patrimoine, les méridiennes d’horloger, la biographie du vésulien Auguste Gauvain et l’étude d’un foyer protestant en Haute-Saône dans la première moitié du XVIIe siècle accompagnent l’émouvante présentation du comportement des enfants dans la tourmente de la première guerre mondiale.
Dans la Revue d’Histoire religieuse des Pays de l’Ain, n° 14, 2019 (Société nouvelle Gorini), des articles variés présentent des travaux locaux (Histoire des Cordeliers à Bourg, L’église de Neuville-les-Dames, les Paroisses de Boyeux-Saint-Jérôme au XIXe s) et deux travaux d’encore plus vaste envergure (l’un s’intéressant aux hôpitaux de la Guerre de 14-18 dans l’Ain, l’autre à l’existence du diocèse de Belley). Par ailleurs, c’est une belle recherche sur Le vitrail religieux au XIXe siècle dans l’Ain qui, par son originalité et l’importance des sources et du corpus utilisés, retiendra l’attention du lecteur.
Les Travaux du Centre Beaunois d’études historiques, t. 38, 2020 offrent à la lecture un épisode des tribulations d’un missionnaire en Chine vers 1700, donnant à l’auteur l’occasion de revenir sur la compétition, parfois terrible, entre les missionnaires de la rue du Bac et les Jésuites à cette époque, et une présentation des personnalités diverses de trois avocats bourguignons députés en 1789 et de leur parcours. Un travail s’intéresse, grâce à des documents bien connus concernant la confrérie Saint-Sébastien de Bligny-sur-Ouche à ses deux caractéristiques initiales (entre-aide aux confrères, prières antipesteuses) auxquelles s’ajoutent la direction des sociétés de tir à l’arc avant la Révolution et, au XIXe siècle, une importante participation paroissiale. Un étonnant recueil manuscrit de chansons datant de 1862, l’histoire d’un champion olympique marathonien, bourguignon et alcoolique et le souvenir d’un groupe de soldats indochinois morts au combat en 1940, sur ordre, pour retarder l’avance ennemie font chacun l’objet d’un article.
Des Mémoires de la Société d’Histoire et d’Archéologie de Chalon-sur-Saône, t. LXXXVIII-2020, outre une très importante exploitation bibliographique de la publication de 1588-89 des Meslanges Historiques de Saint-Julien de Balleure, ouvrage rare et bien connu dans lequel quelques noms comtois apparaissent, on retiendra la description archéologique d’un atelier de fondeur de l’âge du bronze final et quatre études précises sur l’évolution des édifices du vieux Chalon au cours du temps.
A lire aussi, Lemouzi, n° 226 (2020-2) qui traite d’un peu d’archéologie (silex moustériens, monnaies antiques). Une enquête sur les productions de jouets en bois par un établissement d’aide aux blessés de la Grande Guerre montre que le Jura n’est pas le seul fabriquant de ce type de jouets au XXe siècle. Avec la publication de deux journaux intimes, on participe, dans l’un, à une plongée dans la vie quotidienne d’un curé qui, entre 1880 et 1904, combat dans sa paroisse, pied à pied, l’influence des hommes de la République -et on est surpris de ne pas trouver dans son journal ni la moindre compréhension de l’institution des lois, ni la trace d’une défense du prêtre de la part de son évêque- tandis qu’un autre article rapporte le journal d’un voyage de Brive jusqu’au Mali à l’occasion d’un convoi humanitaire en 1985 par un ancien « colonial » ; là encore toute une vision d’un monde, pourtant pas si lointain, a changé. A noter enfin la biographie d’un historien contemporain par un de ses élèves qui m’a semblé être un véritable assassinat !
La Société d’histoire de Lyon, 2020, sous le titre Lyon, techniques curieuses, figures et sciences oubliées sous l’Ancien Régime, met en lumière un grand nombre de savants et de découvertes en relation avec la ville. Certes aucun des noms cités ne semble avoir laissé sa trace dans l’histoire des sciences comme aucune des découvertes décrites n’est réellement passée à la postérité. Mais cette modestie même, outre qu’elle raconte avec précision et probité une large partie de la vie savante de la ville entre 1600 et 1850, permet d’attirer l’attention du curieux, mais aussi du chercheur, sur le rôle des sciences exactes et mécaniques au plus près des habitants de cette grande cité et de l’intégration de ses savants dans la vie urbaine.
Le Bulletin n° 11-12, 2018-2019 de la Société neuchâteloise de géographie, présente un dossier intitulé la multirésidentialité en question, dossier qui permet d’envisager la problématique sous des aspects aussi différents que celui de l’envahissement du territoire suisse par les résidences secondaires, de la double résidence dans la littérature jeunesse, chez les retraités mobiles du désert de l’Arizona ou dans la population bushinenguée de chaque côté du Maroni. D’autres questions sont abordées dans cette publication : le développement maraîcher au Burkina Faso, l’eau en zone touristique de montagne, les déchets solides au Cameroun ou l’urbanisation informelle à Delhi.